Les technos québécoises à l’assaut des États-Unis

“Le bon voisinage, c’est payant. Des dizaines d’entreprises québécoises en tout genre ont fait le voyage à Las Vegas au début janvier pour participer au Consumer Electronics Show (CES). Leur objectif : ne pas être laissées de côté par une économie nord-américaine de plus en plus régionalisée.

Le Québec est bien représenté cette année au Consumer Electronics Show de Las Vegas. Pilotée par Investissement Québec International, une cohorte d’une soixantaine de gens d’affaires de la province sillonne les allées du Las Vegas Convention Center… quand ils en ont le temps. Préparée depuis longtemps, leur visite dans cette énorme exposition d’industrie où se côtoient autant des sécheuses que des robots humanoïdes et des voitures volantes prend surtout la forme de nombreuses rencontres avec des partenaires commerciaux éventuels.

Pas de gros kiosques aux dimensions hors-norme ni de jeux de lumière futuristes ici. Quelques tables grises, des fleurs de lys sur des affiches bleues et un tapis moelleux. Pour d’autres, le tape-à-l’oeil, explique le directeur des exportations pour le marché des États-Unis d’IQ International, Dominic Cousineau. « Pour nous, la taille du kiosque est moins importante que le nombre de rencontres qu’on peut y avoir », dit-il en entrevue au Devoir.

Cette stratégie commerciale diffère de celles d’autres pays. La France débarque chaque année avec ses très nombreux kiosques regroupés sous l’enseigne de la French Tech. Israël, la Corée, l’Allemagne et d’autres encore déroulent de larges banderoles au plafond du pavillon de l’hôtel Venetian où sont regroupées les délégations nationales venues présenter leurs nouvelles technologies au CES.

Le Québec est visuellement plus modeste, mais le potentiel de développement des affaires de ses entreprises, lui, ne l’est pas. D’autant plus que l’exposition annuelle est devenue, au fil de ses 56 ans d’existence, un événement d’envergure mondiale autant pour les appareils électroniques du quotidien — comme un lave-vaisselle — que pour les technologies de jeux vidéo ou d’intelligence artificielle de pointe. Il faut ajouter à cela tout le secteur du transport, à l’aube d’un virage électrique et connecté qui fait des véhicules routiers, aériens ou aquatiques autant de petites vitrines technologiques où le Québec peut, lui aussi, briller.

« La technologie est devenue multisectorielle. On la voit en santé, en environnement, dans le transport », constate Dominic Cousineau. Il y abien entendu des entreprises québécoises qui peuvent bénéficier de cette diversification… à condition de bien se positionner. « Le CES est passé d’une exposition présentant des produits pour les consommateurs à un événement pour l’industrie. Les entreprises québécoises que nous amenons ici viennent d’ailleurs présenter des technologies qui peuvent s’intégrer dans celles d’autres entreprises américaines. »

Virage matériel

Une particularité de la cohorte québécoise au CES cette année est la plus grande place faite aux fabricants de composants spécialisés ou électroniques. Le Québec est pourtant davantage reconnu pour ses logiciels et ses applications. Le désintérêt prononcé des États-Unis à l’égard de la production de composants en Chine représente toutefois une occasion d’affaires pour le secteur québécois de la fabrication.

Le fabricant de composants haptiques estrien Boréas Technologies est dans une position particulière. L’entreprise a mis au point, ces dernières années, des surfaces solides qui peuvent réagir au toucher comme le ferait une touche de clavier : elle émet un déclic dont l’intensité peut varier selon la force de cette pression. C’est le genre de composants qu’on trouve dans les ordinateurs personnels, sur les téléphones intelligents, à bord des véhicules modernes… bref, pas mal partout.

En tant qu’entreprise québécoise, Boréas pourrait se tailler une place dans la chaîne d’approvisionnement nord-américaine, tant dans le transport que dans l’informatique. Elle peut aussi répondre aux besoins de fabricants chinois qui désirent se défaire de fournisseurs américains, les deux pays tentant manifestement de régionaliser leurs industries de pointe.

Peu importe, Boréas a besoin de rencontrer ses partenaires commerciaux en personne pour mieux présenter sa technologie. « Venir en personne au CES pour nous, c’est essentiel », confirme Nicolas Duchesne-Laforest, son directeur du marketing. « Après tout, notre technologie tactile, il faut la toucher. »

Le Québec à l’eau

Certaines technologies sont plus flamboyantes que d’autres. Le détecteur de fuites d’eau pour immeubles à logements multiples d’Akisens entre dans la seconde catégorie. Ce système mis au point à Terrebonne, sur la rive nord, est conçu pour être très discret… la plupart du temps. Ses capteurs se collent derrière les toilettes, au pied des chauffe-eau et dans les murs d’appartements ou de copropriétés dont la gestion est centralisée. Les occupants n’ont pas besoin d’y accéder.

Le gestionnaire qui doit superviser quelques centaines de logements en même temps, lui, peut être alerté rapidement si la chasse d’eau d’une toilette est brisée ou si un tuyau gelé a cédé.

Ça semble banal, mais il existe une énorme demande au Canada et aux États-Unis pour ce type de solutions de gestion d’immeubles. Les trois représentants d’Akisens au CES semblent satisfaits de leur visite. « Notre voisin de kiosque nous a dit qu’il recommanderait notre produit à son beau-frère, qui dirige l’association des plombiers du Montana,explique Jimmy Bérubé, directeur du développement des affaires d’Akisens. Notre marché est assez nouveau, mais déjà, on sent qu’il n’y a pas assez de fournisseurs pour satisfaire la demande. »

Pour des entreprises comme Akisens, visiter le CES, c’est en quelque sorte partir à la conquête de cette demande.”

*Publié par le site web ledevoir.com, le 07 janvier 2023

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