“Avez-vous profité des rabais des derniers jours, qui ont commencé avec le Vendredi fou et se sont poursuivis avec le Cyberlundi ? Si oui, vous êtes comme des milliers de personnes, qui n’ont pas été freinées par la hausse du coût de la vie. Même quelques membres de l’équipe économie du Devoir ont succombé à l’achat de vêtements et de produits électroniques.
Si l’on en croit de nombreux commerçants, observateurs et propriétaires de centres commerciaux, les foules dans les magasins étaient semblables vendredi à celles des dernières années. « On sent l’effervescence, il y a un retour du côté festif », a témoigné le porte-parole francophone de Best Buy au Canada, Thierry Lopez, dans un magasin du centre-ville de Montréal. Les boutiques La vie en rose et Bikini village ont constaté une augmentation respective de 7 % et de 35 % de l’achalandage par rapport au week-end de Vendredi fou précédent.
Les achats en ligne ont également été populaires. La majorité de la trentaine de clients de Wiptec, un centre de distribution qui prépare notamment les commandes en ligne pour Sports Experts, Ricardo, Davids Tea et Lolë, ont fait vendredi des ventes de 10 à 15 fois plus élevées que les journées normales.
Les détaillants s’attendaient d’ailleurs à cet engouement. Les intentions d’achats des Québécois et des Canadiens pour les fêtes et pour ces journées de soldes, sondées par les regroupements de commerce, étaient semblables à celles des années précédentes.
Selon le Baromètre d’octobre 2022 du Conseil québécois du commerce de détail, 41 % des Québécois prévoyaient magasiner lors du Vendredi fou ou du Cyberlundi 2022, contre 44 % en 2021 et 37 % en 2019. Les vêtements, l’équipement électronique, les articles de maison et les chaussures arrivent en tête de liste des produits les plus prisés. Toujours selon ce sondage effectué auprès de plus de 1000 répondants, les ménages s’attendent à dépenser une moyenne de 1090 $ pour les Fêtes, dont 323 $ en cadeaux. Il s’agit de montants légèrement supérieurs à ceux des deux dernières années.
Au Conseil canadien du commerce de détail (CCCD), les constats sont similaires, bien que les chiffres exacts diffèrent. D’après son sondage publié en octobre, la majorité des consommateurs disaient qu’ils chercheraient plus que jamais les rabais cette année et qu’ils s’y prendraient plus longtemps à l’avance pour faire leurs emplettes.
« C’est le premier Noël normal en trois ans, alors les gens veulent se gâter », estime Michel Rochette, président du CCCD pour le Québec.
Les consommateurs semblent avoir décidé de miser sur les rabais le plus tôt possible pour limiter les effets de l’inflation sur leur budget, note la professeure de marketing JoAnne Labrecque, de HEC Montréal. « C’est après les Fêtes que ça va être plus difficile », croit-elle.
Et la planète dans tout ça ?
Ces journées de soldes peuvent également être l’occasion de prendre conscience de l’effet de nos habitudes de surconsommation sur l’environnement. Analyste en réduction à la source chez Équiterre, Amélie Côté rappelle que le marketing de ces journées de consommation de masse induit des besoins qui ne sont pas nécessairement réels.
L’organisme Masse critique, tout récemment lancé, veut d’ailleurs utiliser le pouvoir immense du marketing et de la publicité pour valoriser certains comportements, notamment un mode de vie plus sobre. « Ça prend du courage, mais certains commerces devraient dire : on ne fait pas le Black Friday », déclare la fondatrice, Valérie Vedrines.
Cette dernière soutient plutôt des campagnes comme celle de la plateforme Partage Club, une application québécoise de partage d’objets. Elle suggère d’emprunter un certain nombre de biens, comme une mijoteuse, une souffleuse ou un exerciseur pour bébé, plutôt que de les acquérir.
Et si on misait sur le partage et l’économie de seconde main plutôt que sur l’achat de produits neufs ?”
*Publié par le site web ledevoir.com, le 29 Novembre 2022