“La hausse du coût de la vie a ralenti le mois dernier au Canada pour la première fois en plus d’un an. Attribuable au recul du prix de l’essence, cette décélération de l’inflation s’annonce toutefois encore longue avant de revenir à un niveau plus normal.
En juillet dernier, le prix des biens et des services au Canada avait augmenté de 7,6 % par rapport à ce qu’il était un an auparavant, a rapporté mardi Statistique Canada. Bien que très supérieure à la fourchette cible de la Banque du Canada, qui va de 1 % à 3 %, cette hausse de l’indice des prix à la consommation (IPC) sur 12 mois se révèle inférieure à celle de 8,1 % enregistrée en juin, qui était un sommet en presque 30 ans. Cette décélération du taux annuel d’inflation est la première depuis juin 2021.
7,6 %
C’est le taux d’inflation enregistré au Canada en juillet.
Similaire à ce qui a été rapporté aux États-Unis la semaine dernière, ce ralentissement de l’inflation a principalement été le fait de la baisse de 9 % du prix de l’essence en un mois.
Mis à part la réduction temporaire d’une taxe sur l’essence en Ontario, cet adoucissement des prix à la pompe est le résultat de facteurs extérieurs, notamment l’assombrissement des perspectives économiques mondiales, le resserrement des mesures de lutte contre la pandémie de COVID-19 en Chine et le recul de la demande aux États-Unis, a expliqué Statistique Canada.
Aliments, logements et voyage
Pendant ce temps, la guerre en Ukraine et l’augmentation du prix des intrants ont continué de gonfler le prix du panier d’épicerie. De 9,4 % en juin, la hausse sur 12 mois du prix des aliments était rendue à 9,9 % le mois dernier, mais était plus élevée encore pour les fruits frais (11,7 %), le café et le thé (13,8 %) et les œufs (15,8 %).
Du côté du logement, l’indice du coût de l’intérêt hypothécaire (+1,7 %) s’est accru pour la première fois depuis septembre 2020, reflétant la hausse des taux d’intérêt décrétée par la Banque du Canada. Le ralentissement du marché immobilier s’est néanmoins traduit par une diminution de la hausse annuelle du coût d’un logement en propriété (de 6,7 % à 6,3 %), alors que celle du coût d’un loyer s’est accélérée (de 4,3 % à 4,9 %).
Signe de l’assouplissement des règles sanitaires et de la soif de nouveaux horizons des consommateurs, les tarifs aériens se sont accrus de 25 % en seulement un mois, alors que les prix de l’hébergement des voyageurs ont progressé de presque 50 % en un an et que la hausse annuelle du prix des aliments achetés au restaurant a continué de s’accélérer (7,3 %). À l’inverse, le prix des équipements vidéo ou informatiques a diminué depuis un an (-7,3 %).
Rattrapage salarial… au Québec
Établi chaque mois, l’IPC est calculé en fonction d’un panier de 700 biens et services dont le poids relatif a été fixé en fonction des habitudes de consommation des Canadiens. En moyenne, constate Statistique Canada, la hausse des prix sur 12 mois (7,6 %) a continué d’être supérieure à la hausse du salaire horaire moyen des travailleurs canadiens (5,2 %).
Ce n’est toutefois pas le cas au Québec, où l’inflation a été légèrement inférieure à la moyenne canadienne en juillet (7,3 %) et la hausse des salaires, nettement plus forte (8,1 %).
Ce rattrapage des salaires sur l’inflation est le signe que la pénurie de main-d’œuvre oblige de plus en plus les employeurs à desserrer les cordons de leurs bourses, avait observé en juin Statistique Canada, mais aussi que les travailleurs sont en train de se déplacer vers les emplois les plus payants.
D’autres hausses de taux à venir
« Les Canadiens et les Canadiennes pousseront un soupir de soulagement devant les nouvelles données sur les prix à la consommation. Pour la première fois depuis juin 2021, le taux d’inflation annuel est inférieur à celui du mois précédent », ont observé les économistes du Mouvement Desjardins Royce Mendes et Tiago Figueiredo, dans une brève analyse mardi.
« Mais l’heure n’est pas à la complaisance », ont-ils prévenu, le prix des trois quarts des biens et services qui entrent dans le calcul de l’IPC affichant une croissance dépassant encore la limite supérieure (3 %) de la fourchette cible de la Banque du Canada, et plus de la moitié dépassant même les 5 %.
« C’est un pas dans la bonne direction, mais on est encore très loin du but », a constaté à son tour Douglas Porter, économiste en chef de la Banque de Montréal. « On a probablement passé le sommet de l’inflation — en espérant que les prix du pétrole ne repartent pas en fou —, mais celle-ci restera probablement aux alentours de 8 % durant la seconde moitié de l’année avant de véritablement baisser en 2023. »
À la Banque de Montréal comme chez Desjardins, on s’attend maintenant à ce que la Banque du Canada continue, le mois prochain, avec une nouvelle hausse de ses taux d’intérêt de 0,5 point de pourcentage. Depuis mars, la banque centrale canadienne a déjà relevé son taux directeur de 0,25 % à 2,50 %, à la faveur notamment d’une hausse tout aussi spectaculaire qu’inhabituelle d’un point de pourcentage en juillet.
À la Banque Nationale comme à la Banque Royale ou encore à la CIBC, on prévoit plutôt une hausse de 0,75 point. « La situation se compliquera ensuite, car la croissance devrait ralentir avec la réduction de la demande mondiale et l’affaiblissement du marché immobilier, ont expliqué mardi deux de ses économistes, Jocelyn Paquet et Alexandra Ducharme. Dans ce contexte, un nouveau resserrement de la politique monétaire pourrait s’avérer contre-productif, ce qui nous porte à croire que la Banque du Canada fera ensuite une pause pour mesurer les effets des mesures prises jusqu’à présent. »
LES PRODUITS LES PLUS TOUCHÉS PAR LA HAUSSE DES PRIX
- Matières grasses et huiles (par exemple, huile d’olive) : 28,6 %
- Pâtes : 20,0 %
- Beurre : 17,3 %
- Oranges : 16,9 %
- Oeufs : 15,8 %
- Produits de boulangerie : 15,4 %
- Légumes en conserve et autres légumes préparés : 15,4 %
- Condiments, épices et vinaigres : 14,4 %
- Laitue : 14,2 %
- Café et thé : 13,8 %
- Tomates : 13,3 %”
* Publié par le site web de ledevoir.com 17 août 2022